• Kyûdô

    KYÛDÔ
    ou la Méditation Debout, "Ritsu Zen"

    • Introduction •

    Dans le passé, l'arc japonais était utilisé pour chasser, combattre, pour les cérémonies de cour, les jeux, et comme preuve de compétences.

    L'ancien mot du tir à l'arc japonais était le "Kyûjutsu" qui comprenait les compétences et techniques de l'archer de guerre. Quelques anciennes écoles, connues sous le nom de "Ryu", survivent aujourd'hui, avec leurs anciennes cérémonies et jeux, mais le temps où les arcs japonais furent utilisés comme armes de guerre est aujourd'hui bien lointain.

    Le Kyûdô moderne est principalement pratiqué comme une méthode de développement physique moral et spirituel.

     

    • De Kyûjutsu à Kyûdô •

    L'archerie au Japon remonte, comme dans le reste du monde, à la préhistoire. L'originalité de l'arc japonais (arc, dit "Yumi") est liée à l'évolution qu'il va subir en tant qu'arme de guerre au Moyen Âge. Comme le sabre et sous l'influence de la Chine, l'arc sera une arme réservée à la classe des guerriers. Depuis plusieurs siècles donc, le Kyûjutsu (Art de l'Arc) fait partie intégrante du Bushidô la voie des guerriers, au même titre que le Iaidô (Art de dégainer le sabre) ou la cérémonie du thé.
    Une étape importante dans l'histoire des arts martiaux au Japon est la période des Royaumes combattants.
       
    L'atmosphère qui règne au XIVeme siècle est celle de conflits permanents entre féodaux. C'est durant cette période que certaines disciplines se formalisent, dont le Kyûjutsu. Heki Danjo synthétise alors les techniques développées durant les siècles précédents en leur donnant une efficacité reconnue sur les champs de batailles jusqu'à l'arrivée des armes à feu (le mousquet, étant l'ancêtre du fusil) avec les occidentaux au XVI siècle.
    En 1660, à l'époque d'Edo, la paix maintenue par le Shogun Tokugawa va permettre un essor particulier des arts japonais et le mot "Kyûdô" apparaît pour la première fois, grâce au Maître d’Arc Morikawa Kozan. Utilisant deux idéogrammes, "Kyû" (qui veut dire Arc) et "Dô" (Voie), Morikawa Kozan introduit le concept de "la Voie de l’Arc" dans les arts-martiaux.
    Le Kyûdô perdant son rôle militaire deviendra une discipline de base pour l'éducation des Samûrai.
       
    D'autres écoles de Kyûdô sont apparues tout au long de l'histoire du Japon (aujourd'hui, plusieurs centaines de milliers de japonais pratiquent le Kyudo contre seulement 300 en France), avec parfois des sensibilités plus formelles et moins ancrées dans une tradition authentiquement issue du Bushidô. Sous l'influence de l'Occident, à partir de l'ère Meiji, le Kyûdô peu à peu s'est organisé autour d'une fédération qui vise à niveler les disparités pour créer une discipline satisfaisant aux différentes écoles. Tout en maintenant des relations officielles avec la Fédération Japonaise de Kyûdô, l'école Heki Ryu Insai Ha est malheureusement la seule des écoles issues de Heki Danjo, encore vivante à ce jour.

     

    • L'essence du Kyûdô •

    Le Kyûdô, qui veut littéralement dire "La Voie de l'Arc", est considéré aujourd'hui par beaucoup comme le plus pur de tous les arts martiaux.
    L'essence du Kyûdô moderne est dite synonyme de la poursuite de la vérité, de déités et de beauté. La vérité dans le Kyûdô se manifeste dans le tir pur et bien pensé, où les trois éléments de l'attitude, de mouvement et de technique s'unissent dans un état de parfaite harmonie. Un tir "vrai" au Kyûdô n'est pas seulement un tir au milieu de la cible, mais un tir où la flèche peut être considérée comme déjà existante dans la cible avant son lâché. La qualité entoure la courtoisie, la compassion, la moralité, et la non-agression. Dans le Kyûdô, la qualité est montrée en affichant une attitude respectable et une croyance en toute situation. Un bon archer de Kyûdô est une personne qui maintiendra son attitude et sa grace même en période de grand stress et de grand conflit. La beauté rehausse la vie et stimule l'esprit. Dans le Kyûdô, la vérité et la qualité, sont considérés eux-mêmes comme beau. La beauté peut aussi être trouvé dans la grace exquise et la beauté de l'arc japonais, et l'élégance de l'habit de l'archer traditionnel. L'étiquette, qui est simplement la courtoisie habituelle et le respect des autres, est un élément essentiel de la pratique du Kyûdô.

     

    • L'esprit du Kyûdô et la signification des termes en Kyûdô •

    Si on dit du Kyûdô que c'est le Zen-debout (méditation debout, dit "Ritsu Zen" en japonais) ou Zen-en-mouvement (méditation en action), cela tient au fait que le Kyûdô offre des possibilités d'intériorisation et d'introspection semblables à la méditation Zen. Cette discipline permet la compréhension du rapport de l'Être au monde dans sa posture, ses mouvements et sa gestuelle.
    Le Kyûdô est une pratique méditative et une voie de réalisation. Ni l'âge ni le sexe ni la force physique n'ont d'importance pour pratiquer le Kyûdô.
    Au moment du décoché, on peut juger de sa qualité au bruit que fait la corde lorsqu'elle frappe le tympan du bois supérieur de l'arc ; on appelle ce bruit le "Tsurune", "le son de la corde". Dans un Dojo, tout bavardage est à éviter, pour ne pas dire à proscrire, car cela perturbe la concentration et facilite la dispersion.
    Pratiquer le Kyûdô, c'est apprendre à être concentré, c'est la raison pour laquelle on évite toute conversation inutile au cours de l'entraînement.
    Les japonais parlent "d’Anmi-Ittaï ", ce qui signifie l’union des trois éléments essentiels que sont l’esprit, le corps et l’arc en un tout harmonieux.
    "Les concepts de Shin, Zen et Bi" (Vérité, Bonté et Beauté) sont au bout de la flèche "parfaite".

    La notion de Voie est, pour les Occidentaux, difficile à saisir. Le mot Voie vient du mot japonais "Dô" qui vient lui-même du mot chinois "Tao", de la philosophie du Yin et du Yang. Dans le Zen, le mot Voie contient aussi le sens d'esprit ou coeur et est le cheminement vers la réalisation de soi. Le mot "Dô" (dans [Kyû] ; [Dô] ) qui figure dans la composition de chaque discipline spécifique s'écrit par un idéogramme composé en deux parties : l'une signifiant la tête ou le chef, c'est-à-dire la notion de principe originel, l'autre représentant un pied, un déplacement, un progrès. Tout cela implique un déplacement dans le sens d'une origine. Pratiquer dans l'esprit de la Voie devrait amener à la plénitude. Mais cela ne suffit pas de s'atteler simplement à la technique ou à faire attention seulement à son matériel.
    On n'apprend rien lorsqu'on fait attention seulement aux apparences. Un tir qui vient de l'esprit et du cœur, autrement dit qui vient du fond d'un être, est l'expression d'une grande sincérité. Là on touche véritablement à la nature authentique qui sommeille en soi, qui veut s'épanouir. Le mot "Dô" désigne donc également l'Eveil.

    Et, dans cette discipline où n’existe aucun adversaire extérieur, c’est la victoire sur soi-même qu’il faut rechercher. Ni coupe, ni trophée ni autre prix, seule compte la réussite intérieure, qui plus est toujours à refaire.
    Pour éviter toute certitude, pour ne pas dépendre d’une image mais afin de se remettre toujours en question, l’absence de repères est essentielle. Les Sensei vous diront qu’ils recherchent l’harmonie et non l’exploit.
    L’un d’eux, Suzuki Hiroyuki Hanshi a même affirmé que "le tir est franc comme un miroir ; la moindre malhonnêteté ou le moindre problème sera révélé(e) dans le résultat".

     

    • Le matériel de Kyûdô •

    L'arc, dit "Yumi"

    Les arcs utilisés sont les plus grands du monde et sont les seuls à réellement décrire un cercle lors de la décoche. La corde n'a aucune chance de toucher la partie intérieure du bras d'arc lors d'un tir correct, mais de toucher la partie extérieure. Les arcs de kyudo sont asymétriques, un tiers de la longueur en dessous de la poignée, deux tiers au-dessus. Même les plus petits d'entre eux font plus de deux mètres.


    Ils sont faits de matériaux composites : feuilles minces de bois et de bambou collées perpendiculairement les unes par rapport aux autres, poncées et même quelques fois laquées pour résister aux affronts du climat. Pour être un bon archer, il faut connaître son arc intimement, ses points faibles, les endroits qu'il faut retravailler après un jour humide et ceux auxquels il faut faire particulièrement attention lors du montage et du démontage.
    La puissance de l'arc dépend totalement de l'archer. Les maîtres disent seulement qu'elle ne doit être ni trop forte, ni trop faible. Historiquement, la puissance moyenne actuelle est plus faible qu'elle n'a été. Quant à l'ancien entraînement du Kyûjutsu était beaucoup plus sévère que maintenant, avec plusieurs centaines de flèches à tirer chaque jour. Aujourd'hui, dans les Dojos, on tire une quarantaine de flèches les bons jours.


    Les flèches

    Les flèches sont un peu plus longues que les flèches habituelles, car en fin de course, la corde se trouve derrière l'oreille. La longueur d'une flèche, comme la taille de l'arc, dépend totalement de l'archer. La longueur habituelle des flèches est mesurée de l'arrière du cou jusqu'au bout de l'index de la main d'arc plus entre 3 à 7 cm par sécurité.

    Les pointes sont tout aussi variées ; il existait un type de pointe en forme de "U" qui servait à couper les cordes, une autre ressemblait à un bulbe et sifflait en volant, l'air passant dans de petits trous pratiqués dans la pointe. Pour le tir à longue distance, il est long, fin et léger. Pour l'entraînement, il est plus robuste, en bois, en bambou ou en aluminium. L'empennage est souvent fait de plumes naturelles, et le plus souvent de plumes de rapaces, très prisées pour leur grande capacité à fendre l'air.

    La cible, dite "Mato"

    Elle est de distance et de taille variable. La cible standard d'entraînement fait 36 cm de diamètre et est placée à 28 m de l'archer, et placée à 9 cm du sol. Elle a six cercles concentriques et alternativement noir et blanc, y compris le centre. Pendant les cérémonies du Nouvel An, elles sont souvent colorées, de 9 ou 18 cm de diamètres, et décorées de scènes peintes à la main et dorées.

    Le gant, dit "Yugake"

    La main qui tient la corde est protégée par un gant finement réalisé en cuir contenant un soutient pour le poignet. Il existe trois styles de gants :
    - le "Mitsugake" à trois doigts, généralement préféré par les archers au style "Bushakei".
    - le "Yotsugake" à quatre doigts, utilisé par ceux de tendance "Reishakei".
    - le "Morogake" à cinq doigts, principalement par les archers de tendance "Ogasawara Ryu".

    En raison de son utilisation simple et son bas prix, le Mitsugake est recommandé pour le débutant, quel que soit son style.



    Sources bibliographiques :
    "Kyudo : Un Tir, Une Vie" de Michel Martin.
    "Le zen dans l'art chevaleresque du tir à l'arc" de E. Herrigel.


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